L’euro s’est sensiblement apprécié vis-à-vis de la devise canadienne ces derniers mois. Si vous prévoyez visiter le vieux continent cet été, soyez prévenu : votre carte bancaire devrait surchauffer autant que le thermomètre en pleine canicule.
Au début de l’année — moment où vous avez peut-être réservé vos vacances en Europe pour faire un pied de nez aux États-Unis —, il fallait débourser environ 1,48 dollar canadien pour acheter un euro. Aujourd’hui, il en coûte 1,60 dollar canadien, soit une augmentation de plus de 8 %.
En d’autres mots, à l’heure actuelle, une nuitée dans un hôtel à 100 euros vous coûtera environ 160 dollars canadiens. Une facture salée qui vous forcera peut-être à faire une croix sur certains extras.
Si vous avez plutôt opté pour le Royaume-Uni pour vous évader, vous ne serez malheureusement pas beaucoup plus chanceux. Là encore, la devise britannique a pris de l’envol vis-à-vis de celle canadienne.
La valeur d’une livre sterling est passée d’environ 1,75 à 1,86 dollar canadien entre le début de l’année et aujourd’hui, soit une hausse d’environ 6 %. Dans ce cas-ci, une nuitée de 100 livres sterling vous coûtera donc près du double dans votre monnaie d’origine, soit environ 186 dollars canadiens.
Un rabais sur le dollar américain
Paradoxalement, c’est dans la destination boudée par les touristes canadiens — les États-Unis — que la devise locale est actuellement au rabais. Début janvier, juste avant l’inauguration du président Donald Trump, un dollar américain valait environ 1,44 dollar canadien. Il en coûte désormais environ 1,37 dollar canadien, ce qui représente une économie de près de 5 %.
Cette glissade s’explique principalement par la politique économique et commerciale du président républicain, selon Jimmy Jean, économiste en chef du Mouvement Desjardins. « Il y a une perte manifeste de confiance par rapport aux États-Unis et on voit actuellement une reconfiguration de l’échiquier mondial au niveau des devises », observe-t-il.
Résultat : comme le billet vert est moins en demande, le huard en profite. « Les grands investisseurs étrangers sont en train de rééquilibrer leurs portefeuilles pour réduire leur exposition au marché américain et aussi mieux protéger leurs risques par rapport au dollar américain. En temps normal, cette devise procurait une certaine stabilité. Mais ce n’est pas le cas en ce moment », explique M. Jean.
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Un recalibrage des devises à l’international
Si la baisse actuelle du dollar américain est assez simple à comprendre dans le contexte actuel, comment expliquer toutefois l’envolée d’autres devises, notamment de l’euro ?
« Ce qui explique la performance de l’euro, c’est qu’elle a été l’une des devises plus favorisées par le recalibrage en cours », explique Jimmy Jean. « Les investisseurs européens eux-mêmes décident d’être moins déployés aux États-Unis et d’investir plus localement. Mais les investisseurs d’Asie décident aussi de se tourner plus vers l’euro », poursuit-il.
Certes, le dollar canadien a progressé face à la devise américaine, mais pas autant que l’euro. Et c’est pour cette raison que l’écart se creuse.
Si le Canada profite moins que la zone euro du recalibrage des devises, c’est entre autres parce qu’il « est beaucoup plus exposé en matière de commerce avec les États-Unis », pointe M. Jean. Mais c’est aussi parce que « la taille du marché canadien reste beaucoup plus petite comparativement au marché européen », fait valoir l’expert.
Concernant le déclin du dollar américain, l’économiste en chef de Desjardins ne croit pas qu’un grand renversement de la toute-puissance du billet vert se dessine à l’horizon. « L’euro, on dirait que c’est un peu une bouée temporaire. Il reste trois ans et demi au mandat de M. Trump. Les choses peuvent changer d’ici là. Et à moyen et long terme, je dirais que la preuve n’est pas faite que l’euro peut remplacer le dollar, notamment parce qu’il y a beaucoup fragmentation politique à l’intérieur de la zone euro ».
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