Les Bourses en Asie trébuchent de concert vendredi 30 mai, tandis que le dollar fléchit, dans des marchés tourmentés à nouveau par les incertitudes commerciales après le très momentané répit apporté la veille par une décision judiciaire contestant les surtaxes douanières américaines.
L’enthousiasme s’évanouit, l’incertitude pèse
Les marchés asiatiques avaient grimpé jeudi, à l’unisson du dollar, dans le sillage d’une décision de justice américaine bloquant les droits de douane de Washington – mais une Cour d’appel a rapidement suspendu ce verdict, et l’enthousiasme des investisseurs s’est évaporé.
À la Bourse de Tokyo vers 02h00 GMT, l’indice vedette Nikkei perdait 1,33% à 37.918 points et l’indice élargi Topix abandonnait 0,76% à 2.790 points.
La Bourse de Séoul, alors que l’élection présidentielle sud-coréenne bat son plein, reculait de 0,40%. Sydney cédait 0,1%. L’indice hongkongais Hang Seng sombrait de 1,32%, l’indice composite de Shenzhen perdait 0,66% et celui de Shanghai 0,27%.
Certes, Wall Street avait terminé en hausse jeudi: mais les facteurs qui stimulaient New York, comme les bons résultats du champion des puces Nvidia, «avaient déjà été intégrés par Tokyo, et le renforcement du yen» pèse sur les titres des firmes exportatrices, note Kosuke Oka, analyste de Monex Securities. De fait, Toyota (-1,86%), Hitachi (-1,81%) ou Nintendo (-2,71%) piquaient du nez à l’unisson. Ce contexte est propice aux «prises de bénéfices» après la forte hausse du marché tokyoïte enregistrée jeudi, estime Kosuke Oka.
Surtout, le marché digérait le revirement judiciaire aux États-Unis: un tribunal de commerce international (ITC) avait estimé jeudi que Donald Trump avait outrepassé ses pouvoirs en imposant des surtaxes non ciblées, alors qu’il s’agit d’une prérogative du Congrès, bloquant les droits de douane et enthousiasmant les marchés. Mais moins de 24 heures plus tard, une Cour d’appel a suspendu la décision de première instance, le temps de se prononcer sur le fond.
«Les marchés espéraient que la décision (en première instance) mettrait fin à la volatilité sur la politique commerciale. Au lieu de cela, cela s’est transformée en flou juridique: une partie d’échecs judiciaire au ralenti», avec «juste une incertitude accrue», alors même que le contexte macroéconomique s’assombrit, insiste Stephen Innes, de SPI Asset Management. «La guerre commerciale n’est pas terminée, loin de là, mais elle est plongée dans un purgatoire procédural, plongeant les marchés dans les limbes», tandis que les négociations commerciales entre Washington et les pays cibles «entrent dans une phase tactique» avant la date-butoir de début juillet, ajoute-t-il.
Dans ce contexte, «la politique commerciale demeure un facteur-clé de risques (pour les Bourses), tant à la hausse qu’à la baisse (…) si les droits de douane restent en vigueur pendant une période prolongée et que la croissance mondiale ralentit, cela fera pression sur les cours et les bénéfices des entreprises», avertissent les experts d’UBS.
Dollar fragilisé, yen ferme
Le dollar, qui s’était nettement renforcé jeudi après la première décision judiciaire bloquant les droits de douane, retombait vendredi, fléchissant de 0,22% face à la devise nippone vers 02h00 GMT à 143,90 yens pour un dollar. Outre la volte-face judiciaire américaine pesant sur le billet vert, le yen était soutenu par la hausse plus marquée que prévu de l’inflation sous-jacente dans la région de Tokyo en mai, publiée vendredi, marquant sa plus forte hausse en deux ans.
De quoi renforcer les perspectives de voir la Banque du Japon relever à nouveau ses taux dès sa prochaine réunion de politique monétaire en juillet, a estimé Taro Kimura, économiste de Bloomberg Economics. Or des taux plus élevés favorisent l’appétit pour les actifs en yens.
Valeur refuge, l’or continuait de son côté de perdre de son éclat: il reculait de 0,30% à 3.308 dollars l’once.
Le pétrole baisse, l’économie américaine inquiète
Le marché pétrolier continuait de refluer vendredi, plombé par l’image d’une économie américaine en difficulté suite à la publication de plusieurs indicateurs, macroéconomiques décevants (PIB révisé, allocations chômage…), montrant un horizon assombri pour le premier pays consommateur d’or noir. Vers 02h00 GMT, le baril de WTI américain reculait de 0,44% à 60,67 dollars, et celui de Brent de la mer du Nord de 0,30% à 63,96 dollars.