Une « escroquerie » doublée d’une menace contre le dollar. Interrogé en 2021 par Fox News, Donald Trump n’avait pas caché tout le mal qu’il pensait du bitcoin, dont il estimait qu’il devrait être régulé « très très fortement ». Quatre ans plus tard, le milliardaire de retour à la Maison Blanche vient d’autoriser la création d’une réserve stratégique de bitcoins, ainsi qu’un fonds d’actifs numériques. Ces fonds auraient d’abord vocation à conserver, plutôt qu’à les revendre, les cryptomonnaies saisies dans le cadre de procédures civiles ou criminelles. Le décret signé par Donald Trump prévoit toutefois la possibilité pour le Trésor américain d’acheter de nouveaux bitcoins.

En parallèle, l’exécutif dérégule massivement. La cellule enquêtant sur les cryptomonnaies au sein du Département de la Justice vient d’être dissoute. L’obligation faite aux plateformes d’échanges de cryptos de déclarer les transactions au fisc a été annulée.

Donald Trump a même gracié Ross Ulbricht, fondateur de la plateforme de vente Silk Road. Condamné à perpétuité en 2015, notamment pour blanchiment et trafic de stupéfiants, Ulbricht est considéré dans les milieux libertariens comme un martyr, pionnier dans l’utilisation du bitcoin. Pour la première fois, une entreprise (HDR Global Trading, opérant la plateforme BitMex) a aussi fait l’objet d’une grâce présidentielle, en même temps que ses dirigeants, condamnés pour ignorance des lois anti-blanchiment.

Adoption massive des stablecoins

Donald Trump renvoie ainsi l’ascenseur aux “crypto bros”, ces entrepreneurs pour la plupart libertariens qui ont dépensé des fortunes pour le faire élire, et auxquels il avait promis de faire des États-Unis la « capitale mondiale des cryptomonnaies ».

Plusieurs ont été récompensés. Issu comme Elon Musk de la “mafia Paypal”, le milliardaire ultraconservateur David Sacks a été bombardé « tsar de l’IA et des cryptos » par la Maison Blanche. Le secrétaire au Trésor, Scott Bessent, est ouvertement procryptos. Quant au secrétaire au Commerce, Howard Lutnick, c’est l’ancien patron de Cantor Fitzgerald – prestigieuse banque d’investissement dont le partenariat avec Tether a ouvert en grand les portes de Wall Street aux stablecoins, ces cryptos adossées à des actifs classiques. Leur valeur est donc stable, autorisant leur utilisation comme moyen de paiement.

L’adoption des stablecoins est au cœur de l’agenda crypto de Donald Trump. L’an dernier, les transactions ont explosé : à 13 500 milliards de dollars, elles ont déjà dépassé en volume les transactions de Visa. Et les chiffres continuent de grimper. Le paysage est largement dominé par des cryptos adossées au dollar, comme le Tether ou l’USD Coin. Il faut y voir l’équivalent des projets d’euro ou de yuan numériques, avec une différence de taille : ils ne sont pas émis par la banque centrale, mais par des entreprises privées. Un projet finalement très libertarien, qui permet au président américain de contourner une FED dont il ne supporte pas l’indépendance – et d’engranger des gains substantiels au passage.

Une politique qui profite au clan Trump

Parmi les entreprises américaines émettant ces stablecoins figure World Liberty Financial, soutenue par la famille Trump. L’entreprise, qui a conclu des partenariats avec des fonds émiratis, est d’ailleurs gérée par ses fils. Donald Trump a même lancé une cryptomonnaie à son effigie, un jeton purement spéculatif dont il profite de la montée des cours et qu’il utilise pour monnayer son influence : un dîner avec le président à Washington a été offert aux plus gros détenteurs. Des transactions anormales, qui ont permis à une vingtaine de traders d’empocher 100 millions de dollars, ont été repérées à l’occasion du lancement du memecoin de son épouse Melania. Selon le groupe américain State Democracy Defenders Action, Donald Trump posséderait désormais près de trois milliards de dollars en cryptomonnaies. Cela représenterait 40 % de sa fortune.

Les soupçons d’enrichissement personnel commencent toutefois à gêner jusqu’aux propres soutiens de Donald Trump. La semaine dernière, deux sénateurs républicains se sont associés à leurs collègues démocrates pour bloquer le projet de loi sur les stablecoins, essentiel pour que ces derniers disposent d’un cadre légal.



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