Cette fois-ci, il est possible que l’Union européenne (UE) se décide à lancer les grandes manœuvres sans attendre que les États-Unis ne reviennent subitement sur la voie des relations bilatérales tracée depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Motivée par ses inquiétudes concernant le rapprochement spectaculaire opéré par Donald Trump entre Washington et Moscou, l’UE a annoncé, à travers la publication d’un livre blanc sur la défense, le lancement du projet «European Defense Readiness 2030» («Plan de réarmement européen 2030»).
Cette initiative propose d’augmenter les dépenses de défense, de simplifier la réglementation et d’optimiser les programmes industriels. Son objectif est de constituer une réserve de 800 milliards d’euros afin de dynamiser la production d’armement en Europe, ce qui impliquerait une augmentation de 1,5% du produit intérieur brut (PIB) consacré à la défense européenne, lit-on en substance dans les colonnes du magazine en ligne The War Zone. Dans le même temps, ce sont 150 milliards d’euros de prêts pour le nouveau programme «Security Action for Europe» (SAFE) qui vont être accordés aux États membres afin d’investir dans les domaines clés de la défense.
Le Canada, ulcéré par les provocations répétées de Donald Trump et ses menaces d’annexion, envisagerait également de se joindre à cette initiative, tandis que ni le Royaume-Uni ni les États-Unis ne sont mentionnés dans le document.
Réduire leur dépendance aux États-Unis
Ni Washington ni Londres ne pourront vendre des armes aux pays membres de l’UE dans le cadre de cette initiative. L’ensemble des fonds alloués sera destiné à l’achat d’armements de fabrication européenne, alors que, sur la période 2020-2024, 64% des importations d’armes des États européens membres de l’OTAN provenaient des États-Unis. À la lumière des troubles géopolitiques observés avec le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche et la détérioration des relations bilatérales entre les parties, l’UE a tout intérêt à réorienter sa stratégie de défense.
En effet, lorsque Donald Trump a interrompu l’envoi d’armes et de renseignements à l’Ukraine après son accrochage avec Volodymyr Zelensky à la Maison-Blanche, le 28 février 2025, l’inquiétude s’est rapidement propagée en Europe. Par ailleurs, le président américain brandit la menace de désactiver à distance des équipements stratégiques exportés, les rendant inopérants, une allusion à peine voilée aux avions de chasse F-35.
‘There is no kill switch’—The F-35 ‘kill switch’ rumor has been debunked.
“After weeks of speculation, the Pentagon formally denies having the ability to remotely disable @LockheedMartin‘s F-35 fighter jets.”
— F-35 Lightning II (@thef35) March 18, 2025
Face à l’ampleur de la polémique, Lockheed Martin, l’entreprise qui produit les F-35 à dû publier un démenti sur X, pour contester cette rumeur.
En plus de la délicate question de l’armement, se pose également celle de la présence militaire américaine sur le sol européen. Des soldats américains sont déployés sur le continent à travers des bases établies en Allemagne, en Italie et en Pologne. Plus précisément, Trump a évoqué le retrait des 35.000 soldats stationnés en Allemagne, alimentant encore davantage les inquiétudes sur l’engagement des États-Unis envers leurs alliés. Parallèlement, son administration envisagerait de «renoncer au rôle de commandant suprême des forces alliées en Europe de l’OTAN», indique NBC News dans un article du 18 mars 2025.
L’éventuelle rupture entre les États-Unis et l’UE ne semblent pas pour l’instant inquiéter les marchés financiers européens, et pour cause, les indices boursiers des fabricants d’armes européens s’envolent ces derniers mois. La situation pour le moins chaotique fera au moins quelques heureux.