Londres (awp/afp) – Plus de quatre ans après l’entrée en vigueur du Brexit, le Royaume-Uni a esquivé une partie des droits de douane américains qui ont frappé l’Union européenne (UE), mais Londres fait profil bas, espérant décrocher un accord encore plus favorable avec Washington.
Les annonces du président américain Donald Trump mercredi soir “placent le Royaume-Uni dans une position relativement meilleure que, par exemple, l’UE”, s’est félicité jeudi matin le ministre britannique du Commerce, Jonathan Reynolds, sur Sky News.
Londres s’est en effet vu imposer des droits de douane de 10%, le niveau le plus faible annoncé, notamment en comparaison de l’Union européenne (20%) ou de la Chine (34%).
“Il s’agit d’une +victoire+ dans la mesure où la situation (du Royaume-Uni) serait pire si le pays était resté dans l’UE”, mais dans cette situation “tout le monde y perd” en réalité, affirme auprès de l’AFP Jonathan Portes, économiste au King’s College de Londres.
Les conservateurs, actuellement dans l’opposition, n’ont pas manqué l’occasion d’interpeller le gouvernement au Parlement pour rappeler qu’ils étaient à la tête du pays au moment du Brexit.
“J’espère que (les députés travaillistes) auront la décence de regretter les 48 fois où ils ont voté pour rester dans l’Europe et de nous remercier d’avoir mené à bien le Brexit”, a ainsi ironisé Andrew Griffith, responsable conservateur pour le Commerce.
Pas de traitement spécial
De son côté, M. Reynolds a assuré que l’annonce de droits de douane relativement plus faibles “justifie l’approche pragmatique adoptée par le gouvernement” travailliste, qui n’a à ce stade, contrairement à l’UE, pas annoncé de mesures de rétorsion contre Washington – même s’il lance une consultation sur une éventuelle riposte.
Mais Londres n’a pas bénéficié d’un “traitement spécial” assure M. Portes. Le pays a bénéficié selon lui du fait qu’il “n’a pas d’excédent commercial avec les États-Unis” et se retrouve donc placé dans la tranche la plus basse des droits de douane.
Le gouvernement britannique se garde d’ailleurs de tout triomphalisme. “Il est clair que les décisions prises par les États-Unis auront un impact économique” sur le pays, a prévenu jeudi le Premier ministre britannique Keir Starmer lors d’une rencontre avec des chefs d’entreprises à Downing Street.
Mais Londres espère encore améliorer son sort auprès de Washington et négocie d’arrache-pied avec les Américains depuis plusieurs semaines pour tenter de décrocher le graal: un accord qui pourrait supprimer tout ou partie des droits de douane.
Cette idée, rendue possible par le Brexit, remonte à la visite fin février à Washington du Premier ministre travailliste Keir Starmer. Donald Trump avait évoqué un accord “dans lequel les droits de douane ne seraient pas nécessaires”.
Les deux dirigeants entretiennent des relations cordiales depuis le retour au pouvoir de l’Américain, que le gouvernement britannique a toujours pris soin d’épargner dans ses commentaires.
Washington ou Bruxelles?
Mais les États-Unis ne sont que le deuxième partenaire commercial de Londres, loin derrière l’UE, et une question revient souvent: Londres devra-t-il choisir entre Washington et Bruxelles?
Le gouvernement britannique assure pouvoir dialoguer avec les deux camps mais les économistes préviennent que des concessions trop importantes à Washington pourraient refroidir ses partenaires européens.
“Il serait préférable pour l’instant de poursuivre une relation commerciale plus approfondie avec l’UE pour compenser le coût économique” des droits de douane américains, argumente David Henig, du Centre européen pour la politique économique internationale.
Si le gouvernement britannique a fait preuve de flegme jusqu’ici face aux Etats-Unis, le gouvernement rappelle régulièrement que toutes les options (et donc d’éventuelles représailles) sont sur la table.
Faisant monter la pression d’un cran jeudi, il a lancé “un appel à contributions sur les implications pour les entreprises britanniques d’éventuelles mesures de rétorsion” aux droits de douane de Washington, qui court jusqu’au 1er mai.
“Si nous sommes en mesure de conclure un accord économique avec les États-Unis qui lève les droits de douane qui ont été imposés à nos industries”, cette démarche “sera suspendue”, a toutefois assuré M. Reynolds devant le Parlement.
afp/cw