Les prix des obligations d’État britanniques ont connu mercredi leur plus forte baisse depuis octobre 2022, tandis que la livre sterling a dévissé, après que la ministre des Finances Rachel Reeves est apparue visiblement bouleversée au Parlement, au lendemain d’une réduction drastique des plans gouvernementaux visant à diminuer les aides sociales.
Le rendement de l’obligation d’État à 10 ans, ou gilt, a grimpé de 22 points de base dans la journée pour atteindre environ 4,68 %, alors que les investisseurs se sont massivement délestés de la dette britannique.
Il s’agit là de la plus forte hausse journalière du rendement de référence britannique depuis octobre 2022, période marquée par le mini-budget de l’ex-Première ministre Liz Truss, qui lui avait coûté son poste.
La livre sterling a chuté de plus de 1 %, tombant à 1,3589 dollar, tandis que les actions des entreprises britanniques de taille moyenne ont plongé.
RÉACTIONS :
CHRIS SCICLUNA, RESPONSABLE DE LA RECHERCHE ÉCONOMIQUE, DAIWA CAPITAL MARKETS, LONDRES :
« Il est clair que le marché réévalue les perspectives de la politique budgétaire, d’où le fort accentuation de la courbe des gilts. Le vote à la Chambre des communes amène à reconsidérer les perspectives d’endettement public.
Le marché avait compris depuis un certain temps que le gouvernement s’écartait de la trajectoire en matière d’emprunt et anticipait des mesures correctives dans le budget. Mais si les marchés continuent dans la direction observée aujourd’hui, il se pourrait que le gouvernement soit contraint de faire des annonces sur les recettes plutôt que sur de nouvelles coupes dans les dépenses publiques.
La Banque d’Angleterre est manifestement en train de revoir le resserrement quantitatif et il est probable qu’elle mette fin aux ventes d’actifs à l’automne. »
JANE FOLEY, STRATÈGE EN DEVISES SENIOR, RABOBANK, LONDRES :
« Puisque les économies attendues de la réforme de l’aide sociale prévues par la Chancelière Reeves se sont évaporées, les problèmes budgétaires du Royaume-Uni reviennent au premier plan. La courbe des gilts s’est accentuée dès l’ouverture ce matin alors que les inquiétudes sur l’offre refaisaient surface. De plus, la presse britannique spécule sur un possible remaniement ministériel. Certains évoquent même que Starmer pourrait remplacer Reeves au poste de Chancelière. »
NEIL WILSON, STRATÈGE INVESTISSEUR UK CHEZ SAXOBANK, LONDRES :
« Les rendements des gilts augmentaient, mais ont commencé à s’envoler pendant les Questions au Premier ministre, alors que Reeves paraissait complètement ébranlée. »
KATHLEEN BROOKS, DIRECTRICE DE LA RECHERCHE, XTB, LONDRES :
« La perspective de turbulences politiques fait grimper les rendements obligataires. Le marché anticipe la possible nomination d’un nouveau chancelier, au profil plus à gauche, ce qui effraie le marché obligataire et réveille les vigilantes des obligations de leur torpeur. »
DANNI HEWSON, RESPONSABLE DE L’ANALYSE FINANCIÈRE, AJ BELL, LONDRES :
« Rachel Reeves se retrouve dans une situation très difficile après une série de volte-face, ce qui signifie que les économies attendues sur les aides au chauffage hivernal et sur les changements concernant les personnes handicapées… eh bien, elles ne seront pas réalisées.
Elle se retrouve donc avec un nouveau trou budgétaire, et la question est désormais de savoir comment elle va y faire face. Bien sûr, il y a beaucoup de spéculations sur le fait qu’elle devra augmenter les impôts, mais si elle devait le faire après avoir dit le contraire, ce serait politiquement compliqué pour le gouvernement travailliste.
Ce qui s’est passé aujourd’hui au Parlement a clairement déstabilisé les investisseurs. »
(Reportage de l’équipe EMEA Markets Breaking News ; compilation par Amanda Cooper ; édition par Dhara Ranasinghe)
